En apparence, il n’était pas très différent de celui d’aujourd’hui. Grace à Eugène Rendu (1881, p.64), nous pouvons replonger dans la circulaire ministérielle du 17 avril 1866 qui justifie moralement la tenue du nouveau registre journalier, base de la statistique nationale :
« Il s’agit d’enfants dont nous avons la charge, d’unités vivantes dont pas une ne doit être négligée. Ce chiffre que l’instituteur s’astreint à marquer pour une absence, c’est toute une leçon qu’il donne aux enfants, aux familles, au pays. Quand l’Administration dit à l’instituteur qu’il ne doit pas laisser passer inaperçue l’absence d’un seul élève pendant un seul jour, elle dit par là même aux parents que cette absence n’est pas un fait insignifiant ; qu’eux aussi doivent respecter le temps des enfants ; que, dans la durée si réduite des études primaires, les jours, les heures sont comptés ; que priver l’enfant de quelques leçons, chaque mois, c’est priver son intelligence de quelques-unes des ressources et des chances de développement dont elle avait strictement besoin ; c’est causer à cet enfant un préjudice réel en brisant pour lui la suite des idées, le bon ordre de l’enseignement, la progression des exercices ; c’est enfin prendre sur son capital et mutiler cette éducation, qui n’est pourtant que le minimum de la culture nécessaire à l’homme et au citoyen. »
La circulaire du 17 avril 1866 explicite comment faire l’appel car à l’époque cela pouvait s’avérer long au regard des 50, 60 ou 80 noms… et des retardataires très fréquents. Pour éviter de perdre du temps, la circulaire indique de placer aux tables les enfants, dans le même ordre que dans le registre !
La différence avec le registre d’aujourd’hui est que les absences figuraient à gauche et les notes des élèves, à droite. Eugène Rendu (1881, p. 65) rappelle et synthétise les écritures obligatoires de l’instituteur : « Le registre matricule donne la situation financière, le journal de classe indique les opérations faites, le registre d’appel et de notes fournit les résultats moraux obtenus. » Vous pouvez découvrir sur le registre la partie pédagogique et les matières notées. Le mode de notation était : Parfait : 10 ; Très bien : 9 ; Bien : 7 et 8 ; Assez bien : 6 ; Passable : 5 ; Médiocre : 3 et 4 ; Mal : 1 et 2 ; Nul : 0. Et de préciser que ce mode de notation est le même que celui des examens d’admission aux écoles normales, au certificat d’études primaires, et qu’il est suffisamment précis pour y trouver toutes les nuances du mérite !
Si les enfants sont placés aux tables comme sur le registre d’appel, ce n’est pas en référence à l’ordre alphabétique du nom de famille, mais en fonction de ce mérite justement. Le travail du mois permettait à certains de changer de place et d’aller « de l’avant », en fonction des notes mais surtout de l’exactitude et de la conduite : les premiers venaient chercher une récompense exceptionnelle et les derniers baissaient la tête !
Une copie de la page annuelle était transmise en fin d’année scolaire à l’inspecteur de l’enseignement primaire.
Rendu E. (1881). Manuel de l’enseignement primaire. Pédagogique, théorique et pratique. Paris : Hachette. Nouvelle édition remaniée et très augmentée avec la collaboration de A. Trouillet, Inspecteur de l’Instruction Primaire. La première édition date de 1857.